Le mesurage des volumes sur le réseau de pipelines Le Havre-Paris et la dispense de vérification périodique et de vérification après réparationSommaire :
Patrick VILTART Chef de la division Mesure et instrumentation chez Trapil1 La Société des Transports Pétroliers par Pipeline TrapilLa société des Transports Pétroliers par Pipeline (Trapil) exploite en tant que propriétaire de l'ouvrage Le Havre-Paris, le plus ancien et le plus important système de transport de produits pétroliers raffinés par canalisations d'Europe. L'objet initial du réseau était de ravitailler les dépôts de distribution de la région parisienne, ainsi que les aéroports, en produits raffinés provenant des dépôts expéditeurs ou des raffineries de pétrole de Normandie, dans les meilleures conditions de sécurité et d'économie. Au cours des ans, le développement du trafic a conduit à augmenter, d'une part, la capacité de transport mais aussi à étendre le réseau hors de la vallée de la Seine, pour desservir aussi les zones de Caen, d'Orléans et Tours. En 2002, plus de 20 millions de tonnes de produits pétroliers ont été transportées sur le réseau Le Havre-Paris.
Par ailleurs, Trapil exploite pour le compte de société ou d'organisme tiers et en tant que prestataire de services, d'autres réseaux de canalisations de transport d'hydrocarbures en France, tant à usage civil qu'à usage plus spécifiquement militaire.
Sur l'ensemble des réseaux exploités par Trapil, plus de 34 millions de tonnes de produits raffinés ont été ainsi transférés en 2002 avec les mêmes dispositifs de mesurage. 2 Le rôle important de la mesure dynamique des volumesL'activité de Trapil est celle d'un transporteur qui n'est à aucun moment, propriétaire du produit transféré et qui doit être garant au cours du transport, des quantités et de la qualité des produits qui lui sont confiés, tant vis à vis de ses clients, que de l'administration des Douanes, les produits transportés étant sous un régime suspensif de droits et taxes. Dans ce contexte, le mesurage dynamique des volumes prend toute son importance en raison des fonctions techniques, de sécurité et commerciales qu'il permet d'assurer :
Les résultats de mesure étant utilisés entre autres, à des fins de transactions commerciales, les moyens mis en oeuvre doivent répondre à la réglementation française en vigueur sur les instruments de mesure de la catégorie concernée. 3 Organisation et structure du comptageLe comptage, sur le réseau Le Havre-Paris, et plus généralement sur l'ensemble des réseaux de pipelines dont l'exploitation est confiée à Trapil, est structuré autour :
3.1 Les ensembles de mesurage aux points d'entrée/sortie du réseau :Plus de 40 ensembles de mesurage sont installés et en service sur l'ensemble du réseau Le Havre-Paris. Un ensemble de mesurage est composé de manière uniforme :
Le banc de comptageLe banc de comptage se compose de 2 longueurs droites parallèles de tuyauteries identiques dans chacune desquelles est inséré un compteur à turbine avec son tranquilliseur associé. Le compteur et son tranquilliseur, d'un modèle identique pour les 2 branches, sont encadrés en amont et en aval par les longueurs droites réglementaires.
La fonction du banc double est de contrôler en permanence la stabilité de répartition du débit entre les 2 branches. Une instabilité ou une dérive est le témoin d'un comportement anormal du banc et notamment d'un compteur. En fonction des équipements des établissements expéditeurs ou réceptionnaires, entre autres, les débits des produits à travers les bancs se situent entre 120 et 2000 m3/h. Calculateur de comptageLe calculateur de comptage, situé localement en salle de contrôle, acquiert et compare les impulsions émises par chaque compteur, puis les additionne afin de délivrer localement le volume compté, dit volume « brut » (avant toute correction), et le débit. De plus, chaque compteur étant équipé de 2 émetteurs d'impulsions, le calculateur reçoit les impulsions en provenance de ces 2 émetteurs et compare leur cohérence en nombre et en alternance, afin de délivrer une alarme en cas d'anomalie, conformément à la recommandation OIML R 117. 3.2 La station centrale d'étalonnage des compteursTous les instruments mis en 'uvre font l'objet d'étalonnages et de vérifications selon une périodicité définie. En ce qui concerne plus précisément les compteurs, ils sont étalonnés périodiquement et vérifiés dans la station centrale d'étalonnage Trapil de Gennevilliers.
La méthode utilisée est celle de la comparaison directe des volumes au moyen de tubes étalons, méthode normalisée internationalement par l'International Standard Organisation (ISO) sous la référence 7278. Sur un circuit fermé, les conditions d'utilisation (montage, débit, viscosité) sont reproduites et le volume indiqué par le compteur est comparé à celui connu du tube étalon. Ce dernier est matérialisé par le parcours d'une sphère entre 2 détecteurs de passage, dans une section de tube calibrée dont le volume est raccordé à la chaîne nationale des étalons. Périodiquement, des intercomparaisons avec d'autres laboratoires français et étrangers possédant le même type d'équipement, démontrent la cohérence des volumes de référence entre eux, dans les limites des incertitudes de chacun. La station d'étalonnage Trapil comporte 2 installations de ce type, qu'il est possible d'utiliser sur 6 hydrocarbures liquides différents, de viscosité comprise entre environ 0,5 et 120 mm2/s, dans une plage de débit d'environ 10 à 2500 m3/h. La procédure d'étalonnage est unique pour tous les compteurs. Elle permet :
Outre les instruments utilisés sur les réseaux exploités par Trapil, la station effectue de nombreux autres étalonnages pour le compte de tiers.
3.3 Le calcul centralisé des volumesLes mesures délivrées par le calculateur local de comptage et les instruments associés sont télétransmises en continu au centre de conduite du réseau (dispatching), où sont réalisés les calculs de correction et de conversion des volumes aux conditions de base de pression et de température, ainsi que l'impression des bons de livraison ou d'expédition servant aux transactions commerciales et aux déclarations en Douane.Tous ces calculs sont réalisés conformément aux recommandations de la norme ISO 4267-2, relative au calcul des quantités de pétrole en mesurage dynamique.4 Historique de la dispense de vérification périodique et de vérification après réparationVu le décret du 30 novembre 1944 portant règlement d'administration publique en ce qui concerne le contrôle des Instruments de mesure, l'article 2 du décret du 12 avril 1955 stipulait que les instruments mesureurs volumétriques, à chambres mesureuses, de liquides autres que l'eau, utilisés à des fins de transactions commerciales était soumis à vérification périodique. Les résultats de cette vérification par un agent de l'État, représentant les services officiels de la Métrologie Légale, se traduisaient par l'apposition d'une marque sur la plaque d'identification et de poinçonnage solidaire de l'instrument. Si l'instrument était conforme, cette marque était une lettre de l'alphabet en caractère majuscule romain. Si l'instrument n'était pas conforme, une marque de refus, sous la forme d'une croix formée par les diagonales d'un carré, était apposée. Le décret n° 72-145 du 18 février 1972 et l'arrêté du 12 mai 1972 précisaient les dispositions pour les ensembles de mesurage à turbine dont l'usage se répandait alors. La périodicité de vérification pour les compteurs turbines étaient fixés à 1 an, mais pour tenir compte des conditions particulières liées à un usage sur pipeline avec la mise en place d'une station centrale d'étalonnage, une seconde limite relative au volume mesuré était ajoutée. Les mesureurs turbine devaient subir la vérification périodique soit après un an de fonctionnement, soit après passage d'un volume correspondant à mille heures de fonctionnement au débit maximal. La première des limites atteintes déclenche la vérification périodique. Par dérogation, l'article 30 du même texte précisait que la vérification pouvait ne pas s'effectuer au lieu d'utilisation mais sur un banc d'essais sur lequel pouvaient être reconstituées les conditions particulières d'utilisation. Cette disposition dérogatoire rendait alors possible l'utilisation de la station centrale d'étalonnage Trapil. Dans ce cas, les deux derniers chiffres du millésime étaient insculpés sur la plaque signalétique du mesureur par l'agent de l'État représentant les services de Métrologie Légale. Pour les calculateurs locaux, la vérification se devait d'être faite annuellement et sur site, à l'aide de générateurs d'un nombre prédéterminé d'impulsions, se substituant à celles émises par les compteurs turbine en présence d'un agent de l'État. Les mêmes marques de vérification étaient insculpées sur la plaque signalétique et de poinçonnage. L'article 6 de l'arrêté du 12 mai 1972 imposait également la sécurisation de la transmission des impulsions entre les mesureurs turbine et le calculateur local de comptage, notamment à l'aide de scellements posés et déposés, soit par des agents des services de la Métrologie Légale, soit par des agents de sociétés agréés par les services de la Métrologie. D'autres scellements étaient également apposés dans les mêmes conditions pour limiter les interventions sur les calculateurs et les mesureurs à turbine. L'exploitation continue des pipelines, la nécessité de maintenir en permanence l'état fonctionnel des ensembles de mesurage à toute heure du jour et de la nuit, nécessitaient pour Trapil de pouvoir intervenir à tout moment sur l'ensemble de ces scellements et des instruments de la chaîne locale de comptage. Après constitution et dépôt d'un dossier de demande de marque, une marque d'identification P92, était délivrée à Trapil le 4 novembre 1986, permettant à ses agents habilités de déposer et poser les scellements dans des conditions parfaitement déterminées. Pour chaque intervention se substituant à celle d'un agent de l'État, une fiche d'un modèle défini était alors adressée au plus tard dans les 5 jours après l'intervention, aux services de Métrologie Légale. Le changement périodique des mesureurs turbine envoyés pour vérification périodique en station centrale d'Étalonnage pouvait aussi s'effectuer hors présence d'un agent de l'État. Cette première étape dans la responsabilisation de l'Industriel était une évolution majeure par rapport aux précédentes pratiques. En 1988, l'article 44 du décret du 6 mai, prévoit la possibilité de dispenser un détenteur d'instruments de mesure réglementés de la vérification périodique et de la vérification après réparation des instruments qu'il détient, lorsque ce détenteur met en 'uvre des dispositions suffisantes en matière de vérification et d'entretien.Toutefois, l'application de cet article ne se justifiait que si 3 conditions étaient remplies par le détenteur :'une expérience acquise lors des vérifications par les Services de Métrologie auprès du détenteur attestant une bonne maîtrise de la qualité des Instruments; La première condition avait déjà pu être démontrée auprès des services de Métrologie. Avec plus de 40 ensembles de mesurage, la dernière condition était également remplie sans difficulté. Aussi, dès parution de la circulaire précédemment citée, Trapil mettait en place activement en 1992, un système d'Assurance de la Qualité de la Fonction Métrologique, apte à satisfaire les exigences spécifiées dans l'annexe de la circulaire. L'attribution préalable de la marque P92 et les autorisations d'intervention sur les chaînes de comptage qui avaient suivi, avaient permis à Trapil d'apprécier toute l'efficacité qui pouvait être retirée d'une telle organisation, à la fois sur un plan technique, mais aussi sur un plan humain, à travers l'implication et la responsabilisation directe de ses agents. Compte tenu de l'étendue des activités de Trapil sur le territoire français et afin de conserver une unicité dans les dispositions prises sur l'ensemble des installations de pipeline concernées, une Direction Régionale de l'Industrie et de la Recherche (DRIR), en l'occurrence celle de l'Île de France, était chargée d'assurer le pilotage de cette mise en place. Après examen du dossier établi et un audit initial, la décision de dispense était accordée par la Direction Régionale de l'Île de France. Au vu des résultats de l'audit initial, les autres Directions Régionales de la Recherche et de l'Industrie concernées accordaient la même dispense à Trapil dans les mois qui suivaient. Simultanément, Trapil entamait les démarches et prenait les dispositions nécessaires pour faire accréditer ses différents laboratoires de Métrologie (Station d'Étalonnage des compteurs, laboratoires de Thermométrie, de Pression et de Masse volumique); ces accréditations délivrées initialement par le Bureau National de Métrologie, et aujourd'hui par le Comité Français d'Accréditation (Cofrac) permettent de garantir le raccordement et la traçabilité aux étalons nationaux des mesures de volumes, température, pression et masse volumique réalisées par les ensembles de mesurage de volume de Trapil. Ces accréditations complètent parfaitement les dispenses accordées. Depuis, l'Assurance Qualité de la Fonction Métrologique a été étendue aux autres Ouvrages de pipeline dont Trapil assure l'exploitation en tant que prestataire de services. Cette extension a permis à ces autres Ouvrages de bénéficier de la dispense de vérification périodique et de vérification après réparation. Des audits périodiques (tous les 2 ans) sont menés à l'initiative de la DRIRE pilote d'Île de France. Ces audits permettent de détecter toute anomalie dans le système et permettent une amélioration permanente de l'Assurance de la Qualité de la fonction Métrologique. Des visites de surveillance sont aussi réalisées périodiquement par les DRIRE concernées.Dans le cadre du décret n° 2001-387 du 3 mai 2001 et des arrêtés qui en ont suivi, toutes les dispenses accordées ont été reconduites en 2002. Toutefois, aucune autorisation de mise en service n'avait jusqu'alors été délivrée pour le calculateur situé au centre de conduite du réseau de pipelines Le Havre-Paris et assurant les calculs de correction et de conversion des volumes aux conditions de base de pression et de température. Aussi, un travail important, en collaboration étroite entre les Services de Métrologie Légale, notamment la DRIRE de l'Île de France, et Trapil, commençait en 1998 en vue d'aboutir à la délivrance d'une telle autorisation. En juin 2003, un certificat de vérification d'installation regroupant : L'ensemble complet du comptage des volumes sur le réseau de pipelines Le Havre-Paris, depuis les sites locaux, jusqu'au site central de conduite du réseau, entrait ainsi dans le cadre des décisions de dispense de vérification périodique et de vérification après réparation. 5 ConclusionLes solutions techniques originales, innovantes et performantes, mises au point en collaboration étroite à la fois avec les Services Officiels de Métrologie Légale et les fabricants d'instruments français, permettent à Trapil de garantir une haute Qualité Métrologique dans le mesurage dynamique des volumes d'hydrocarbures transportés sur les réseaux de pipelines dont elle assure l'exploitation. L'évolution continue qu'ont suivie les Services Officiels de Métrologie Légale tout au long des années, pour garantir la Qualité des Instruments de mesure et des opérations de mesurage à des fins de transactions commerciales, a permis à Trapil : |